JMSN : l'art du lâcher-prise (interview)

JMSN : l'art du lâcher-prise (interview)

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Quand j’ai appris que JMSN allait se produire le 17 avril au Trix d’Anvers, j’ai immédiatement voulu négocier une interview, l’Américain étant sur la liste des artistes que j’admire le plus, parce qu’ils ont une réelle vision et parviennent ainsi à mettre tous mes sens en émoi à travers leur musique et l’esthétique qui y est liée.

Oui mais voilà, comme ce fut le cas lors de mon entrevue avec Alex Vargas, mon admiration va souvent de pair avec un soupçon d’intimidation et j’étais donc déjà tétanisée avant même d’avoir envoyé mon e-mail à son attachée de presse. La boule au ventre ne m’a pas quittée lorsque je me suis retrouvée face à un JMSN on ne peut plus décontracté, habillé nonchalamment d’un short et d’un simple t-shirt blanc, cheveux longs de Jésus en chignon et espadrilles aux pieds. À la cool je vous dis, comme s’il était en vacances. Les vacances, moi j’en sortais justement à peine et le stress était revenu au galop aussitôt atterrie sur le sol belge. Mais souvenez-vous : “un sourire ne coûte rien mais produit beaucoup” et “donne du repos à l’être fatigué” (crédits : le poème cheesy qui trône sur le mur de mon salon). Au bout de quelques questions passées à me laisser fasciner par la dentition parfaite de ce cher Christian (que je n’avais jamais vu sourire dans ses clips, comprenez donc mon choc suprême), j’ai donc enfin pu me détendre et profiter de notre conversation sans prise de tête.

Une philosophie que suit également Adam, son manager qui refuse de se présenter comme tel malgré que ce soit le titre qui lui est attribué dans tous les échanges d’e-mails, et qui prend plaisir à papoter avec les fans. À l’instar de JMSN d’ailleurs, présent pour des photos et autographes à la fin de son concert. C’est le privilège des petites salles. Avec en plus l’avantage de ne devoir débourser que 10€ pour en profiter. Pourtant, Dieu sait que j’aurais accepté de dépenser dix fois plus tant j’ai apprécié son show. Car si JMSN a le souci du détail quand il crée sa musique, il prend bien soin de lâcher prise lorsqu’il présente celle-ci en live, Boogie Basics et riffs de guitare soi-disant “à moitié convenables” (d’après ses dires) inclus. Et qu’est-ce que ça fait du bien ?! Alors prenez ses bonnes vibes et mangez-en tous, ceci est son interview, livrée pour vous.

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The American Boy Tour était ta première tournée européenne. Comment tu te sens alors que la dernière date approche ? As-tu remarqué des différences entre les audiences des deux continents ?
Oui, il y a définitivement des différences entre les publics et c’est génial. C’est tellement dingue de venir ici et que des gens assistent à ton concert. C’est hallucinant. Tu vois ce que je veux dire ? Ce n’est pas si différent que ça, mais ça l’est en même temps. Tu es à un endroit différent et les gens te connaissent ! Ils sont à fond et cela m’inspire d’une manière complètement différente. C’est super.

Tu as eu l’occasion d’écrire durant cette tournée ?
Non. Attends ! En fait, oui : j’ai écrit des textes ! Je n’ai pas composé ou autre… Je m’occuperai de ça plus tard !

Blue est un album au son très live. Est-ce que c’était voulu dès le départ, en sachant que tu t’embarquerais dans cette tournée européenne (et américaine) ensuite ?
Oui, c’est sûr ! Je veux partir en tournée après chaque album et je pense que j’étais attiré par… je voulais aller vers un son plus live et, avec un peu de chance, je m’en rapprocherai encore plus avec le prochain opus. La seule raison pour laquelle ce n’était pas le cas auparavant, c’est parce que je manquais de ressources donc je me rapproche tout doucement du but.

Ton prochain album sera-t-il très différent de tes projets précédents ?
Oui, il le sera d’un point de vue lyrique, musical et sur le plan de la production… J’ai déjà commencé à travailler sur les chansons et elles vont dans une direction totalement différente. Je suis excité et anxieux à la fois ; je pense que c’est bon signe d’être nerveux pour ce genre de choses, ça signifie que tu sors vraiment de ta zone de confort.

Je ressens une vraie présence féminine sur chacun de tes albums, tant dans les thèmes que dans les chœurs et les interludes… Ça te dirait de faire une vraie collaboration féminine un jour ?
Oui, ce serait génial ! L’un de mes artistes préférés est Prince. C’est une grande inspiration pour moi et il a toujours eu des femmes sur ses chansons. Je m’inspire de lui sur ce plan, comme dans Waves où j’ai demandé à ce qu’une femme chante le refrain car le sentiment n’aurait pas été juste si je l’avais chanté moi-même, tu vois ? Donc j’ai trouvé une chanteuse pour le faire.

Est-ce qu’il y a une chanteuse avec qui tu rêverais de travailler ?
Il y en a plusieurs et je pense que Lauryn Hill serait en tête de liste (rires) ! Mais je trouve qu’il vaut mieux que je m’améliore pour ça !

Tu as déjà collaboré avec beaucoup de grands noms donc… on ne sait jamais !
Oui mais ils ne sont quand même pas aussi bons que Lauryn Hill ! Je dis ça, je dis rien… (rires)

Ta famille semble beaucoup te soutenir. Tu viens d’une famille très musicale ? Comment tu t’es retrouvé là-dedans ?
Oui. Mais je ne me suis jamais dit à un moment donné que je voulais faire de la musique : ça a tout simplement toujours été en moi. Je ne me souviens pas avoir fait quoi que ce soit d’autre. Je ne me souviens pas avoir voulu faire quoi que ce soit d’autre. Je ne pense pas avoir été attiré par quoi que ce soit d’autre que la musique. Ça a juste toujours été comme ça. C’est hallucinant de repenser à la façon dont tout a commencé ou de me demander ce que je ferais si je n’étais pas chanteur aujourd’hui… Mais ça a juste toujours été comme ça. Tu sais, beaucoup de gens ne savent pas ce qu’ils aiment. Bizarrement, je l’ai su dès le départ. J’ai eu de la chance !

Pourquoi la religion tient-elle une place aussi importante dans ta musique ? Est-ce une façon pour toi de faire réfléchir les gens ou… ?
Je suppose que tu pourrais me considérer comme une personne spirituelle. C’est juste que je pense que la religion et la spiritualité sont à la base de la race humaine. C’est important et c’est ancré en chacun de nous. On se pose tous cette question : “Qu’est-ce que c’est ?”.  On sait tous qu’il y a quelque chose là-haut, on essaie tous de savoir quoi. Cette chose est présente dans tout ce que je fais. Tout est lié par cette unique chose, que tu appelles ça une énergie, l’univers — peu importe, c’est là. Et pour moi, visuellement parlant, j’ai choisi de personnifier le Christianisme mais ça pourrait tout aussi bien être un Musulman, un Hindou ou Bouddha, peu importe. Ce n’est pas parce que j’ai choisi de mettre ce visage là-dessus et que ça se limite strictement à ça. C’est la même chose. Personnifier ça de la sorte, c’est un choix personnel : c’est juste que j’aime ces images et j’ai lu ce que la Bible raconte et compagnie. Je n’ai pas fait suffisamment de recherches que pour représenter quoi que ce soit d’autre. Mais quand j’applique ça à la vie quotidienne, j’ai l’impression que tout aspire à la même chose : ça aide la race humaine. Donc je ne promeus rien d’autre que ça : l’amour.

Tu t’amuses quand même un peu avec ça (ex. : le clip de Fallin’)… Est-ce que c’est parfois pour toi aussi un moyen de provoquer ?
Non, jamais ! Je pense que je cherche juste à aider les gens à relativiser. Ce n’est pas aussi sérieux, ni aussi littéral que ça en a l’air. J’essaie juste de pousser les gens à évoluer, même si ce n’est qu’un tout petit peu.

Les visuels ont beaucoup d’importance dans ta musique. Qu’est-ce qui t’inspire ? L’art contemporain, le cinéma ? Je peux percevoir tellement de références différentes dans ton travail…
Je regarde tout. Je ne connais même pas la moitié des artistes des images que je regarde. Je passe tout en revue comme sur Tumblr : j’y suis une série de blogs dont les feeds, les images, se retrouvent sur ma timeline et je fais tout défiler pour trouver l’inspiration. C’est un peu le même principe que se balader à une exposition d’art.

Je me disais justement que tu pourrais carrément faire une exposition avec tout ton art !
Oui, un jour, je ferai quelque chose dans cet esprit-là mais je trouve que je suis encore en train de trouver mes marques dans la musique et d’essayer de vraiment maîtriser tout ça. Une fois que ce sera fait, alors je pense que je pourrai dédier du temps à autre chose. En tout cas, je ne veux pas trop m’éparpiller !

D’où vient l’idée de tes derniers clips très old school ?
Oh, c’est arrivé naturellement ! On avait tourné un clip pour Street Sweeper, avec une bonne caméra et une équipe, tout ça… et ça ne rendait pas bien. C’était le même scénario [que le clip actuel]. Mais je ne ressentais rien. Puis, j’ai déniché une caméra VHS à 20 dollars et on a tout refilmé. Et c’était exactement ce que je voulais. Donc j’ai dit : “Bon bah… Continuons comme ça !”.

Tu devrais faire un VHS de la tournée !
Oh oui ! Oui ! J’aimerais faire un VHS avec tous les clips réunis sur une cassette vidéo et je ferai une édition spéciale !

En parlant de ça, j’ai vu le VHS Boogie Basics en statut sold out sur ton site. Cette cassette existe vraiment ou c’est juste une blague ?
Elle a vraiment été enregistrée ! Et j’adore le fait que l’illustration soit juste une étiquette. J’ai littéralement scanné la cassette vidéo : je l’ai foutue sur le scanner et je me suis dit : “C’est la bonne” (rires) !

Tu as dit dans une interview précédente qu’Universal n’avait pas voulu de la direction de ton premier album Priscilla. S’ils revenaient aujourd’hui vers toi avec un contrat, qu’est-ce que tu leur répondrais ?
Je ne sais pas, ce serait à voir… Je veux dire, c’est bien plus compliqué que de dire juste “oui” ou “non”. Je ne suis réfractaire à rien. Si quelqu’un veut filer un coup de main, je lui demanderai “Comment est-ce que tu veux m’aider ?”. C’est comme ça que je fonctionne. Et, tu sais, Universal m’a approché par la suite mais ça n’a pas marché parce que… La personne que je suis maintenant comparée à celle que j’étais à l’époque… J’ai posé des questions auxquelles ils ne voulaient probablement pas répondre, tu vois ce que je veux dire ? Donc j’étais là “Qu’est-ce que vous allez faire ? Comment vous allez m’aider ?”. Et si quelqu’un ne peut pas répondre à ces questions alors ça ne sert à rien que j’aie une conversation avec cette personne. Je suis sûr qu’un jour, je trouverai quelqu’un qui arrivera à faire des choses qu’on ne parvient toujours pas à faire. JMSN, ce n’est que mon tour manager et moi-même. On a une attachée de presse au Royaume-Uni, un autre aux States et c’est à peu près tout. Si on peut ajouter des membres à l’équipe, tant mieux. Mais on doit savoir ce que tu comptes faire pour nous car il n’est pas question de rien faire. On n’a aucun intérêt à travailler avec quelqu’un qui ne fait rien, ou qui fait quelque chose dont on s’occupe déjà. Il faut qu’il y ait une valeur ajoutée, une force !

Tu as par ailleurs ton propre label, White Room Records. Tu as signé de nouveaux artistes ? J’ai entendu le nom d’Alcordo circuler — je l’adore. Quelle est la situation actuelle ? C’est signé ?
Non, pas encore. Mais on est à deux doigts. Elle vient de m’envoyer quelques notes côté business et on est en train d’arranger tout ça mais je pense que ce sera pour très bientôt. Je ferai une annonce officielle quand ce sera le cas. Je suis très excité de présenter cette nouvelle artiste. On a déjà écrit les chansons donc ce sera facile quand ce serait fait, une fois que les choses seront clarifiées. Et Pearl arrive bientôt avec un nouvel album. Je n’ai pas encore décidé s’il sortira avant celui d’Alcordo ou après, mais il est aussi très bon. Il est presque fini : on attend juste quelques featurings supplémentaires.

Pour conclure, comme tu fais tout toi-même, est-ce que tu pourrais nous décrire une journée dans la peau de JMSN?
Wow. Je me réveille, je prends ma douche, je vais chercher un café puis… Non, attends : je me réveille, je prends ma douche, j’envoie les commandes de merchandising s’il y en a, et puis je sors me chercher un café. Ensuite, je reviens et je travaille tout simplement sur ma musique et vérifie s’il y a des e-mails auxquels je dois répondre ou autre. (C’est musique toute la journée !) Même le week-end ! J’essaie toujours… Il n’y a rien que j’aime plus au monde, honnêtement. Donc c’est mon métier, oui, et c’est ma carrière mais c’est avant tout parce que j’adore ça, je suppose, donc j’y consacre tout mon temps et je cherche constamment à m’améliorer.

Si ce n’est déjà fait, n’oubliez pas de lire la première partie de notre interview concernant ses goûts musicaux !

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